L'actualité depuis hier soir prend le pas sur ma petite vie très ordinaire...
Soudain, à seulement quelques centaines de kilomètres de nous, l'horreur, l’innommable, le chaos... et la détresse.
La télévision tourne depuis ce matin, et je navigue entre soupirs et larmes, elles sont là, au coin de mes yeux, elles refusent de couler, pour ne pas donner raison, pour ne pas laisser la terreur vaincre et remporter la bataille...
Je pense à ces mères, ces pères, ces fils, ces filles qui aujourd'hui cherchent quelqu'un qu'ils ne reverront plus jamais, à ce petit garçon qui ne verra pas revenir son papa, à ces pères ayant emmené leurs fils voir un match de foot, à cette bande de copains sortis faire un peu la fête...
Je pense à cette jeune femme qui peut-être hier soir rencontrait le grand amour, qui s'était faite belle pour sortir entre copines, qui croisait le regard d'un homme qu'elle aurait aimé connaître mieux avant que quelqu'un ne décide pour elle qu'elle ne sortirait jamais de cette soirée, qu'aucun regard ne croiserait plus le sien, qu'aucun homme ne ferait d'elle une femme heureuse, une épouse, une mère...
Cela aurait du être juste un vendredi soir banal...
Ce n'était qu'un vendredi soir sur la terre.
C'est devenu un cauchemar, soudain.
Aujourd'hui, mon coeur est déchiré, martelé, emmietté...
Aujourd'hui je pense à Mes Trois, ces trois petits loupiots que sont mes enfants, mes poussins, mes amours, ma chair, mes trois vies...
Que faut-il leur dire de ce monde qui demain sera le leur?
Comment leur raconter ce que nous-mêmes, adultes, avons tant de mal à entendre?
Comment montrer le néant, le chaos, l'innommable... et puis les coucher ce soir en leur disant encore qu'ils n'ont rien à craindre?
Comment leur apprendre encore qu'il faut des idéologies pour vivre, qu'il faut rêver pour grandir, qu'il faut oser pour avoir? Comment leur dire de croire encore en l'être humain, de n'avoir jamais peur de l'autre, de penser que toujours, tout est encore possible?
Il me faut reprendre espoir pour continuer à élever encore mes trois rêves, mes trois merveilles, pour en faire encore mieux, demain, des hommes et des femmes respectueux de l'autre, des hommes et des femmes qui croient foncièrement en l'humanité, des hommes et des femmes qui non seulement rêvent mais aussi se battent pour construire un monde meilleur.
Il ne faut pas laisser le silence s’installer, il faut vraiment nous aider. Maintenant il faut qu’on soit groupé contre cette horreur. La terreur ne doit pas empêcher la joie de vivre, la liberté, l’expression (...) Jamais on ne laissera la liberté s’éteindre.Philippe Val à France Inter le 7 janvier 2015